La Belgique avait ses raisons de dire « non » aux avions de chasse européens. Reste une occasion manquée pour l’Europe de la défense. Un choix qui « va a contrario des intérêts européens », affirme ce vendredi Emmanuel Macron. Ce n’est qu’une demi-surprise puisque le F-35 de Lockheed Martin faisait figure de favori depuis des mois. Mais, jeudi, la Belgique a confirmé finaliser l’achat de 34 de ces avions de chasse américains. Un contrat de 3,6 milliards d’euros qui file donc entre les doigts des concurrents européens, Rafale de Dassault en tête, mais aussi l’Eurofighter Typhoon. Pourquoi la Belgique a-t-elle préféré cet avion de chasse américain. Si la décision prête à débat, elle peut s’expliquer en quatre points. Mars 2017: la Belgique lance une procédure d’achat pour remplacer une cinquantaine de ses F-16. Les États-Unis avec le F-35 et le Royaume-Uni avec le Typhoon (fabriqué par le consortium Eurofighter intégrant aussi l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne) ont répondu en bonne et due forme à l’appel d’offres formulé d’État à État. Le gouvernement français, lui, s’est distingué en proposant « une coopération approfondie » avec l’armée de l’air belge, dépassant la simple fourniture des Rafale. Et sans fixer de prix. Une proposition que le ministre de la Défense, le flamand Steven Vandeput, a rapidement écartée. « Nous regrettons que la France se soit volontairement soustraite à l’obligation de présenter une offre dans le cadre de notre mise en concurrence transparente », a-t-il déclaré jeudi. Didier Reynders a laissé entendre que l’offre française était hors course depuis plusieurs mois. La collaboration militaire entre la France et la Belgique est plombée par une affaire qui date des années 1990. Le scandale de corruption Agusta-Dassault avait fait chuter plusieurs ministres belges à l’époque. Le dossier plane encore sur le pays, lorsqu’il est question de gros achats militaires. Si dans le cas du remplacement des F-16, la Belgique a opté pour une procédure stricte d’État à État, c’est parce que la N-VA, le parti nationaliste qui domine la coalition au pouvoir, « a voulu se distancier du PS et des vieilles pratiques qui ont été condamnées dans le passé », explique à l’AFP Christophe Wasinski, professeur de relations internationales à l’Université libre de Bruxelles. Les nationalistes flamands du N-VA, justement, ont pesé de tout leur poids dans le choix américain. Plutôt Atlantiste qu’Européen, le parti le mieux représenté à la Chambre des représentants belge imprime sa marque pour le long terme avec ce choix. La maintenance et le modus opérandi dépendent d’un contrôle des États-Unis, y compris en opérations, avec des logiciels opérés depuis là-bas. C’est une des raisons du refus de l’Allemagne de l’acquérir – tandis que l’Italie, la Norvège, le Danemark ou les Pays-Bas n’ont pas eu ces réserves. « Ce n’est pas un choix européen, c’est pire qu’une claque, c’est désespérant pour l’Europe de la défense », a résumé Jean-Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman, un centre de réflexion européen. Suivez le lien pour en savoir plus sur ce vol en avion de chasse.
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